Responsabilité du syndic dans le suivi des travaux décidés en assemblée générale de copropriété

Syndic de copropriété, c’est un métier, particulièrement exigeant en ce que, bien loin de la simple exécution de formalités administratives, il implique un service complet et rigoureux auprès des copropriétaires.

C’est ce que vient nous rappeler la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence, le 27 juin 2024, rendu sur renvoi de cassation, après un arrêt rendu par la Cour de cassation le 16 novembre 2023.

Après un vote en assemblée générale, des travaux avaient été confiés à une entreprise qui avait cependant abandonné le chantier, avant d’être placée en liquidation judiciaire.
Le syndicat des copropriétaires avait alors poursuivi son syndic, estimant qu’il avait mal suivi les travaux en procédant notamment à des paiements trop élevés au profit de l’entreprise au vu de l’avancement réel des travaux et qu’il aurait dû conseiller le recours aux services d’un maître d’œuvre ou d’un ingénieur-structure au regard de l’importance du chantier.

Après que, dans un premier arrêt, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence ait rejeté cette demande, au motif d’un défaut de démonstration des fautes du syndic, la Cour de cassation était intervenue, pour poser les principes applicables :

Il résulte [l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ] que le syndic est responsable à l’égard du syndicat des copropriétaires des fautes commises dans l’accomplissement de sa mission.

Ce faisant, la haute juridiction avait jugé qu’il incombait à la Cour d’Appel de « constater que le syndic avait accompli toutes les diligences lui incombant dans la gestion des travaux ».

La feuille de route posée à la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence, autrement composée, était donc claire, et c’est sans état d’âme que celle-ci l’exécute par son arrêt du 27 juin 2024 :

En vertu de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, le syndic doit assurer l’exécution des décisions de l’assemblée générale.

Il lui appartient ainsi d’assurer le suivi et le contrôle de la bonne exécution des travaux votés par les copropriétaires, sauf à ce que la copropriété se soit adjoint les services d’un maître d »uvre, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Le syndic engage donc sa responsabilité s’il n’accomplit pas toutes les diligences lui incombant dans la gestion des travaux.

Ces énoncés sont totalement clairs, et dénués d’ambiguïté, quant au périmètre des missions du syndic.

Ce qui conduit d’ailleurs la Cour d’Appel à rejeter également la tentative de l’assureur RC, également dans la cause, de décliner sa garantie, rappelant en effet que :

C’est bien en sa qualité d’agent immobilier et gérant d’immeubles que [le syndic] engage sa responsabilité et, dès lors, les développements de [l’assureur] sur son absence de garantie de l’activité non déclarée de maître d’oeuvre sont sans incidence.

Cela étant, pour la copropriété en cause, l’arrêt ne représente qu’une victoire à la Pyrrhus, après un parcours procédural complexe, de plus de dix années, qu’on imagine particulièrement pénalisant et coûteux pour chacun des copropriétaires – y compris quant aux inéluctables difficultés qui en résultent, notamment en cas de cession de leurs lots.

Aur regard de cette jurisprudence, les pragmatique auront évidemment beau jeu de conclure qu’elle conforte la nécessité de faire appel à de véritables professionnels pour une copropriété, et d’écarter les offres « law coast » et autres braconniers du secteur.

CA Aix-en-Provence, ch. 1 3, 27 juin 2024, n° 23/14809

Cass. civ., 16 nov. 2023, n° 22-21.144.